domingo, 1 de agosto de 2010

Anatole France y un cuento suyo prácticamente olvidado: “El priorato”

 

Un día, andando por Coyoacán, entré casualmente a una de esas librerías “de viejo” y después de un rato di con un libro que meimage interesó. Había pedido prestada la escalera y estaba merodeando en el sexto o séptimo nivel de un librero enorme. Ahí, en un rincón, leí en el lomo de un librito color verde oscuro: “Anatole France, Le  jardin d'Épicure”. El nombre del autor me sonó familiar al instante y lo hojeé. Me decidí a comprarlo por 60 pesos a pesar de lo empolvado y de lo negras que me dejó las manos.

Sin duda, el nombre me pareció conocido porque Anatole France es  uno de esos autores que uno encuentra citados continuamente en los lugares más diversos; pero también es uno de esos escritores que, paradójicamente, hoy en día parecen ser poco leídos de manera directa.

Pongo aquí, pues, mi pequeña contribución a que se conozca un poco más este autor. Se trata de un cuento del cual  –hasta donde yo sé- no había traducción alguna al español. Es lo que muchos catalogarían como “cuento filosófico”. Vale la pena reflexionar junto con él.

 

Le Prieuré

Anatole France

A Teodor de Wyzewa.

Je trouvai mon ami Jean dans le vieux prieuré dont il habite les ruines depuis dix ans. Il me reçut avec la joie tranquille d’un ermite délivré de nos craintes et de nos espérances et me fit descendre au verger inculte où, chaque matin, il fume sa pipe de terre entre ses pruniers couverts de mousse. Là, nous nous assîmes, en attendant le déjeuner, sur un banc, devant une table boiteuse, au pied d’un mur écroulé où la saponaire balance les grappes rosées de ses fleurs en même temps flétries et fraîches. La lumière du ciel tremblait aux feuilles des peupliers qui murmuraient sur le bord du chemin. Une tristesse infinie et douce passait sur nos têtes avec des nuages d’un gris pâle.

Après m’avoir demandé, par un reste de politesse, des nouveles de ma santé et de mes affaires, Jean me dit d’une voix lente, le front sourcilleux :

– Bien que je ne lise jamais, mon ignorance n’est pas si bien gardée qu’il ne me soit parveu dans mon ermitage, que vous avez naguère contredit, à la deuxième page d’un journal, un prophète assez ami des hommes pour enseigner que la science et l’intelligence sont la source et la fontaine, le puits et la citerne de tous les maux dont souffrent les hommes. Ce prophète, si j’ai de bons avis, soutenait que, pour rendre la vie innocente et même aimable, il suffit de renoncer à la pensée et à la connaissance et qu’il n’est de bonheur au monde que dans une aveugle et douce charité. Sages préceptes, maximes salutaires, qu’il eut seulement le tort d’exprimer et la faiblesse de mettre en beau langage, sans s’apercevoir que combattre l’art avec art et l’esprit avec esprit, c’est se condamner à ne vaincre que pour l’esprit et pour l’art. Vous me rendrez cette justice, mon ami, que je ne suis pas tombé dans cette pitoyable contradiction et que j’ai renoncé à penser et à écrire dès que j’ai reconnu que la pensée est mauvaise et l’écriture funeste. Cette sagesse m’est venue, vous le savez, en 1882, après la publication d’un petit livre de philosophie qui m’avait coûté mille peines et que les philosophes méprisèrent parce qu’il était écrit avec élégance. J’y démontrais que le monde et inintelligible, et je me fâchai quand on me répondit qu’en effet je ne l’avais pas compris. Je voulus alors défendre mon livre ; mais, l’ayant relu, je ne parvins pas à en retrouver le sens exact. Je m’aperçus que j’étais aussi obscur que les plus grands métaphysiciens et qu’on me faisait tort en ne m’accordant pas une part de l’admiration qu’ils inspirent. C’est ce qui me détacha tout à fait des spéculations trascendantes.  Je me tournai vers les sciences d’observation et j’étudiai la physiologie. Les principes en sont assez stables depuis une trentaine d’années. Ils consistent à fixer proprement une grenouille avec des épingles sur une planche de liège et à l’ouvrir pour observer les nerfs et le coeur, qui est double. Mais je reconnus tout de suite que, par cette méthode, il faudrait beacoup plus de temps que n’en promet la vie pour découvrir le secret profond des êtres. Je sentis la vanité de la science pure, qui, n’embassant qu’un parcelle infiniment petite des phénomènes, surprend des rapports trop peu nombreux pour former un système soutenable. Je pensai un moment me jeter dans l’industrie. Ma douceur naturelle m’arrêta. Il n’y a pas d’entreprise dont on puisse dire d’avance si elle fera plus de bien que de mal. Christophe Colomb, qui vécut et mourut comme un saint et porta l’habit du bon saint François, n’aurait pas cherché, sans doute, le chemin des Indes s’il avait prévu que sa découverte causerait la massacre de tant peuples rouges, à la vérité vicieux et cruels, mais sensibles à la souffrance, et qu’il apporterait dans la vieille Europe, avec l’or du Nouveau Monde, des maladies et des crimes inconnus. Je frissonnai quand de fort hônnetes gens parlèrent de m’intéresser dans des affaires de canons, de fusils et d’explosifs où ils avaient gagné de l’argent et des honneurs. Je ne doutais plus que la civilisation, comme on la nomme, ne fût une barbarie savante et je résolus de devenir un souvage. Il ne me fut pas difficile d’exécuter ce dessein à trente lieues de Paris, dans ce petit pays qui se dépeuple tous les jours. Vous avez vu sur la rue du village des maisons en ruine. Tous les fils des paysans quittent pour la ville une terre trop morcelée, qui ne peut plus les nourrir.

» On prévoit le jour où un habile homme, achetant tous ces champs, reconstituera la grande propriété, et nous verrons peut-être le petit cultivateur disparaître de la campagne, comme déjà le petit commerçant tend à disparaître des grandes villes. Il en sera ce qu’il pourra. Je n’en prends nul souci. J’ai acheté pour six mille francs les restes d’un ancien prieuré, avec un bel escalier de pierre dans une tour et ce verger que je ne cultive pas. J’y passe le temps à regarder les nuages dans le ciel ou, sur l’herbe, les fusées blanches de la carotte sauvage. Cela vaut mieux, sans doute, que d’ouvrir des grenouilles ou que de créer un nouveau type de torpilleur.

» Quand la nuit est belle, si je ne dors pas, je regarde les étoiles, qui me font plaisir à voir depuis que j’ai oublié leurs noms. Je ne reçois personne, je ne pense à rien. Je n’ai pris soin ni de vous attirer dans ma retraite ni de vous en écarter.

» Je suis heureux de vous offrir une omelette, du vin et du tabac. Mais je ne vous cache pas qu’il m’est encore plus agréable de donner à mon chien, à mes lapins et à mes pigeons le pain quotidien, qui répare leurs forces, dont ils ne se serviront pas mal à propos pour écrire des romans qui troublent les cœurs ou des traités de physiologie qui empoisonnent l’existence.

A ce moment, une belle fille, aux joues rouges, avec des yeux d’un bleu pâle, apporta des œufs et une bouteille de vin gris. Je demandai à mon ami Jean s’il haïssait les arts et les lettres à l’égal des sciences.

— Non pas, me dit-il : il y a dans les arts une puérilité qui désarme la haine. Ce sont des jeux d’enfants. Les peintres, les sculpteurs barbouillent des images et font des poupées. Voilà tout! Il n’y aurait pas grand mal à cela. Il faudrait même savoir gré aux poètes de n’employer les mots après les avoir depouillés de toute signification si les malheureux qui se livrent à cet amusement ne le prenaient point au sérieux et s’ils ne devenaient point odieusement égoïstes, irritables, jaloux, envieux, maniaques et déments. Ils attachent à ces niaiseries des idées de gloire. Ce qui prouve leur délire. Car de toutes les illusions qui peuvent naître dans un cerveau malade, la gloire est bien la plus ridicule et la plus funeste. C’est ce qui me fait pitié. Ici, les laboureurs chantent dans le sillon les chansons des aïeux ; les bergers, assis au penchant des collines, taillent avec leur couteau des figures dans les racines de buis, et las ménagères pétrissent, pour les fêtes religieuses, des pains en forme de colombes. Ce sont là des arts innocents, que l’orgueil n’empoisonne pas. Ils sont faciles et proportionnés à la faiblesse humaine. Au contraire, les arts des villes exigent un effort, et tout effort produit la souffrance.

« Mais ce qui afflige, enlaidit et déforme excessivement les hommes, c’est la science, qui les met en rapport avec des objets auxquels ils sont disproportionnés et altère les conditions véritables de leur commere avec la nature. Elle les excite à comprendre, quand il est évident qu’un animal est fait pour sentir et ne pas comprendre ; elle développe le cerveau, qui est un organe inutile, aux dépens des organes utiles, que nous avons en commun avec les bêtes ; elle nous détourne de la jouissance, dont nous sentons le besoin instinctif ; elle nous tourmente par d’affreuses illusions, en nous répresentant des monstres qui n’existent que par elle ; elle crée notre petitesse en mesurant les astres, la brièveté de la vie en évaluant l’âge de la terre, notre infirmité en nous faisant soupçonner ce que nous ne pouvons ni voir ni atteindre, notre ignorance en nous cognant sans cesse à l’inconnaissable et notr misère en multipliant nos curiosites sans les satisfaire.

«  Je ne parle que de ses spéculations pures. Quand elle passe à l’application, elle n’invente que des appareils de torture et des machines dans lesquelles les malheureux humains sont suppliciés. Visitez quelque cité industrielle ou descendez dans une mine, et dites si ce que vous voyez passe pas tout ce que les théologiens les plus féroces ont imaginé de l’enfer. Pourtant, on doute, à la réflexion, si les produits de l’industrie ne sont pas moins nuisibles aux pouvres qui les fabriquent qu’aux riches qui s’en servent et si, de tous les maux de la vie, le luxe n’est point le pire. J’ai connu des êtres de toutes les conditions : je n’en ei point rencontré de si misérables qu’une femme du monde, jeune et jolie, qui dépense, à Paris, chaque année, cinquante mille francs pour ses robes. C’est un état qui conduit à la névrose incurable. »

La belle fille aux yeux clairs nous versa le café avec un air de stupidité heureuse.

Mon ami Jean me la désigna du bout de sa pipe qu’il venait de bourrer:

– Voyez, me dit-il, cette fille qui ne mange que du lard et du pain et qui portait, hier, au bout d’une fourche les bottes de paille dont elle a encore des brins dans les cheveux. Elle est heureuse et, quoi qu’elle fasse, innocente. Car c’est la science et la civilisation qui ont créé le mal moral avec le mal physique. Je suis presque aussi heureux qu’elle, étant presque aussi stupide. Ne pensant à rien, je ne me tourmente plus. N’agissant pas, je ne crains pas de mal faire. Je ne cultive pas même mon jardin, de peur d’accomplir un cte dont je ne pourrais pas calculer les conséquences. De la sorte, je suis parfaitement tranquille.

– A votre place, lui dis-je, je n’aurais pas cette quiétude. Vous n’avez pas supprimé assez complètement en vous la connaissance, la pensée et l’action pour goûter une paix légitime. Prenez-y garde. Quoi qu’on fasse, vivre, c’est agir. Les suites d’une découverte scientifique ou d’une invention vous effraient parce qu’elle sont incalculables. Vous faites bien de l’honneur à l’intelligence, à la science et à l’industrie en croyant qu’elles tissent seules de leurs mains les filets des destinées. Les forces inconscientes en ferment aussi plus d’une maille. Peut-on prévoir l’effet d’un petit caillou qui tombe d’une montagne? Cet effet peut être plus considerable pour le sort de l’humanité que la publication du Novum Organum ou que la découverte de l’électricité.

« Ce n’était un acte ni bien original, ni bien réfléchi, ni, à coup sûr, d’ordre scientifique que celui auquel Alexandre ou Napoléon dut de naître. Toutefois des millions de destinées en furent traversées. Sait-on jamais la valeur et le véritable sens de ce que l’on fait? Il y a dans les Mille et une Nuits un conte auquel je ne puis me défendre d’attacher une signification philosophique. C’est l’histoire de ce marchand arabe qui, au retour d’un pèlerinage à la Mecque, s’assied au bord d’un fontaine pour manger des dattes, dont il jette les noyaux en l’air. Un de ces noyaux tue le fils invisible d’un Génie. Le pauvre homme ne croyait pas tant faire ave un noyau, et, quand on l’instruisit de son crime, il en demeura stupide. Il n’avait pas assez médité sur les conséquences possibles de toute action. Savons-nous jamais si, quand nous levons les bras, nous ne frappons pas, comme fit le marchand, un génie de l’air? A votre place je ne serais pas tranquille. Qui vous dit, mon ami, que votre repos dans ce prieuré couvert de lierre et de saxifrages n’est pas un acte d’un importance plus grande pour l’humanité que les découverts de tous les savants, et d’un effet véritablement désastreux dans l’avenir? »

– Ce n’est pas probable.

– Ce n’est pas impossible. Vous menez une vie singulière. Vous tenez des propos étranges qui peuvent être recueillis et publiés. Il n’en faudrait pas plus, dans certaines circonstances, pour devenir, malgré vous, et même à votre insu, le fondateur d’une religion qui serait embrassée par des millions d’hommes, qu’elle rendrait malheureux et méchants et qui massacraraient en votre nom des milliers d’autres hommes.

– Il faudrait donc mourir pour être innocent et traquille?

– Prenez-y garde encore : mourir, c’est accomplir un acte d’un portée incalculable.

(Anatole France, Le jardin d’Épicure, Calmann-Lévy Éditeurs, París, 1921, pp.225-238)

 

El priorato

Anatole France

(Traducción de Joaquín Rodríguez B.)

Encontré a mi amigo Jean en el viejo priorato cuyas ruinas habita desde hace diez años. Me recibió con la alegría tranquila de un eremita despojado de nuestros miedos y de nuestras esperanzas y me hizo bajar al vergel sin cultivar donde cada mañana fuma su pipa de tierra entre sus ciruelos cubiertos de musgo. Ahí nos sentamos, esperando el desayuno sobre una banca, frente a una mesa coja, al pie de un muro caído en el que la jabonaria balanceaba los racimos rosados de sus flores al mismo tiempo marchitas y frescas. La luz del cielo parpadeaba entre las hojas de los álamos que murmuraban al borde del camino. Una tristeza infinita y dulce pasaba sobre nuestras cabezas junto con unas nubes de un gris pálido.

Después de haberme pedido, por un resto de cortesía, noticias de mi salud y de mis asuntos, Jean me dijo con voz lenta y rostro severo:

– Aunque no leo nunca, mi ignorancia no está lo suficientemente resguardada como para que no llegara en mi retiro –que usted hace mucho tiempo atacó en la segunda página de un diario– un profeta muy amigo de los hombres para enseñar que la ciencia y la inteligencia son el origen y la fuente, el pozo y la cisterna de todos los males que sufren los hombres. Este profeta, si mal no recuerdo, sostenía que para hacer la vida inocente e incluso amable basta con renunciar al pensamiento y al conocimiento y que no hay felicidad en el mundo más que en una ciega y dulce caridad. Sabios preceptos, máximas saludables, que él tuvo sólo el error de expresar y la debilidad de ponerlos en un lenguaje bello, sin darse cuenta de que combatir el arte con el arte y la mente con la mente es condenarse a no vencer sino a favor de la mente y a favor del arte. Me concederá usted esto, amigo mío: que yo no he caído en esta lamentable contradicción y que renuncié a pensar y a escribir en cuanto noté que el pensamiento es malo y la escritura, funesta. Esta cordura me llegó, usted lo sabe, en 1882, después de la publicación de un pequeño libro de filosofía que me había costado mil penalidades y que los filósofos despreciaron porque estaba escrito con elegancia. Demostraba ahí que el mundo es ininteligible, y me irrité cuando me respondieron que, en efecto, no lo había comprendido. Quise entonces defender mi libro, pero después de releerlo no conseguí encontrarle otra vez su sentido exacto. Me percaté entonces que yo era tan oscuro como los más grandes metafísicos y que se actuaba en mi perjuicio al no concederme una parte de la admiración que ellos inspiran. Eso fue lo que me alejó totalmente de las especulaciones trascendentes. Me volví hacia las ciencias de observación y estudié fisiología. Sus principios son bastante estables desde hace una treintena de años. Consisten en inmovilizar apropiadamente una rana con agujas sobre una tabla de corcho y abrirla para observar los nervios y el corazón, que es doble. Pero me di cuenta en seguida que, con este método, se necesitaría mucho más tiempo que el que promete la vida para descubrir el secreto profundo de los seres. Sentí la vanidad de la ciencia pura, la cual, abarcando sólo una parcela infinitamente pequeña de fenómenos, descubre correspondencias demasiado escasas para formar un sistema sustentable. Pensé un momento en lanzarme a la industria. Mi bondad natural me detuvo. No hay empresa alguna de la cual se pueda decir por adelantado si hará más bien que mal. Cristóbal Colón, que vivió y murió como un santo y llevó el hábito del buen san Francisco, no habría buscado, sin duda, el camino de las Indias si hubiera previsto que su descubrimiento causaría la masacre de tantos pueblos rojos, en verdad viciosos y crueles, pero sensibles al sufrimiento, y que llevaría a la vieja Europa, junto con el oro del Nuevo Mundo, enfermedades y crímenes desconocidos. Me estremecí cuando personas sumamente honestas hablaron de que me interesara en asuntos de cañones, fusiles y explosivos, donde ellos habían ganado dinero y honores. Ya no dudé más que la civilización, como la llaman, fuera una barbarie sabia y decidí volverme un salvaje. No me fue difícil cumplir este designio a treinta leguas de París, en esta pequeña región que se despuebla todos los días. Ha visto usted en la calle del pueblo casas en ruinas. Todos los hijos de los nativos abandonan, para ir a la ciudad, una tierra demasiado repartida que ya no puede alimentarlos.

“Se ve venir el día en el que un hombre hábil, comprando todos estos campos, reinstaurará la gran propiedad, y veremos tal vez al pequeño agricultor desaparecer de la región, como ya el pequeño comerciante tiende a desaparecer de las grades ciudades. Pasará lo que tenga que pasar. No me preocupa en absoluto. Compré por seis mil francos los restos de un viejo priorato, con una bella escalera de piedra en una torre y este jardín que no cultivo. Aquí paso el tiempo mirando las nubes en el cielo o, sobre la hierba, los destellos blancos de la zanahoria silvestre. Más vale eso, sin duda, que abrir ranas o crear una nueva clase de buque torpedero.

“Cuando es bella la noche, si no estoy durmiendo, miro las estrellas, que me complacen la vista desde que olvidé sus nombres. No recibo a nadie, no pienso en nada. No tuve el cuidado de atraerlo a usted ni de apartarlo de aquí.

“Me alegra ofrecerle una tortilla (omelette), vino y tabaco. Pero no le oculto que me agrada aun más darles a mi perro, a mis conejos y a mis palomas, el pan cotidiano que repara sus fuerzas, que no desperdiciarán para escribir novelas que afligen los corazones o tratados de fisiología que envenenan la existencia.”

En ese momento, una bella muchacha de mejillas rojizas y ojos de un azul pálido trajo huevos y una botella de vino gris. Le pregunté a mi amigo Jean si odiaba las artes y las letras del mismo modo que las ciencias.

– Para nada –me dijo–; hay en las artes una puerilidad que desarma al odio. Son juegos de niños. Los pintores, los escultores pintarrajean imágenes y hacen muñecas. ¡Y eso es todo! No habría un gran problema en eso. Habría incluso que tener reconocimiento para los poetas por emplear las palabras sólo después de haberlas despojado de todo significado, si los desgraciados que se entregan a este entretenimiento no lo tomaran en serio y si no se hicieran por ello odiosamente egoístas, irritables, celosos, envidiosos, maniáticos y dementes. Les otorgan ideas de gloria a estas necedades, lo cual demuestra su delirio. Pues de todas las ilusiones que pueden nacer en un cerebro enfermo, la gloria es por mucho la más ridícula y la más funesta. Eso es lo que me da lástima. Aquí, los trabajadores cantan en el arado las canciones de los antepasados; los pastores, sentados al pie de las colinas, tallan con su cuchillo figuras en raíces de boj, y las amas de casa amasan pan en forma de palomas para las fiestas religiosas. Éstas son las artes inocentes, que el orgullo no envenena. Son fáciles y acordes a la debilidad humana. En cambio, las artes de las ciudades exigen un esfuerzo, y todo esfuerzo produce sufrimiento.

“Pero lo que aflige, estropea y deforma excesivamente a los hombres es la ciencia, que los pone en relación con objetos con los cuales no guardan proporción y altera las condiciones reales de su interacción con la naturaleza. Ella los incita a comprender, cuando es evidente que un animal está hecho para sentir y no para comprender; desarrolla el cerebro, que es un órgano inútil, en detrimento de los órganos útiles, que tenemos en común con las bestias; nos aleja del placer, por el cual sentimos una necesidad instintiva; nos atormenta con espantosas ilusiones, representándonos monstruos que existen sólo gracias a ella; crea nuestra pequeñez al medir los astros, la brevedad de la vida al evaluar la edad de la tierra, nuestra imperfección al hacernos sospechar lo que no podemos ni ver ni alcanzar, nuestra ignorancia al sacudirnos sin cesar hacia lo incognoscible, y nuestra miseria al multiplicar nuestra curiosidad sin satisfacerla.

“Me refiero sólo a sus especulaciones puras. Cuando pasa a la aplicación, la ciencia no inventa sino aparatos de tortura y máquinas en las que los desgraciados humanos son atormentados. Visite alguna ciudad industrial o baje a una mina, y diga si lo que ve no rebasa todo lo que los teólogos más feroces han imaginado del infierno. Y sin embargo, se duda, al reflexionar, si los productos de la industria son menos dañinos para los pobres que los fabrican que para los ricos que los utilizan, y si de todos los males de la vida el lujo es el peor. He conocido a seres de todas las condiciones: no he encontrado a alguno más miserable que una mujer de mundo, joven y bonita, que gasta en París cada año cincuenta mil francos por sus vestidos. Es un estado que conduce a la neurosis incurable.”

La bella muchacha de ojos claros sirvió el café con un aire de estupidez alegre.

Mi amigo Jean la señaló con el filo de su pipa, que acababa de cargar:

– Mire a esta chica –me dijo– que no come más que tocino y pan, y que ayer arrastraba con el extremo de una horca montones de paja, de los cuales todavía tiene pedazos en el cabello. Es feliz y, haga lo que haga, inocente. Pues son la ciencia y la civilización los que han creado el mal moral junto con el mal físico. Yo soy casi tan feliz como ella, siendo casi tan estúpido. Sin pensar en nada, ya no me atormento. Sin actuar, no temo hacer daño. Ni siquiera cultivo mi jardín, por miedo a cometer un acto cuyas consecuencias no podría calcular. De tal modo, estoy completamente tranquilo.

– En su lugar –le dije–, yo no tendría esta tranquilidad. No ha suprimido por completo en usted el conocimiento, el pensamiento y la acción como para gozar de una paz legítima. Tenga cuidado. Sin importar lo que se haga, vivir es actuar. Los efectos de un descubrimiento científico o de una invención lo asustan porque son incalculables. Pero el pensamiento más simple, el acto más instintivo, también tiene consecuencias incalculables. Le hace usted mucho honor a la inteligencia, a la ciencia y la industria al creer que sólo ellas tejen con sus propias manos la trama de los predestinados. Las fuerzas inconscientes concluyen también más de una urdimbre suya. ¿Se puede prever el efecto de una piedrecilla que cae de una montaña? Este efecto puede ser más considerable para la suerte de la humanidad que la publicación del Novum Organum o que el descubrimiento de la electricidad.

“No fue un acto muy original, ni muy reflexionado, ni, con toda seguridad, de orden científico, aquel en el que Alejandro Magno o Napoleón hubo de nacer. Aun así, millones de predestinados fueron afectados por ello. ¿Acaso se sabe el valor y el verdadero sentido de lo que se hace? En Las Mil y una Noches hay un cuento al cual no puedo evitar adjudicar un significado filosófico. Es la historia de un mercader árabe que, al volver de su peregrinaje a la Meca, se sienta al borde de una fuente para comer dátiles, y arroja las cáscaras al aire. Una de estas cáscaras mata al hijo invisible de un Genio. El pobre hombre no creía poder hacer tanto con una cáscara y, cuando se le hizo ver su crimen, se quedó estupefacto. No había meditado lo suficiente en las posibles consecuencias de toda acción. ¿Acaso sabemos si, cuando levantamos los brazos, no golpeamos un genio del aire como lo hizo el mercader? Si yo fuera usted, no estaría tranquilo. ¿Quién le dice, amigo mío, que su reposo en este priorato cubierto de hiedra y saxífraga no es un acto de una importancia más grande para la humanidad que los descubrimientos de todos los sabios, y de un efecto verdaderamente desastroso para el porvenir?”

– No es probable.

– No es imposible. Usted lleva una vida singular. Tiene ideas extrañas que pueden ser reunidas y publicadas. Y no haría falta más, en ciertas circunstancias, para que se convirtiera, a pesar de usted e incluso sin quererlo, en el fundador de una religión que sería abrazada por millones de hombres, a los cuales volvería desdichados y malvados, y que masacraría a nombre de usted millares de otros hombres.

– ¿Habría entonces que morir para ser inocente y estar tranquilo?

– Tenga cuidado aquí también. Morir es cumplir un acto de una magnitud incalculable.

 

__________________________________________________________

Solamente añado algo que me pareció interesante del cuento. Es muy llamativo lo que A. France pone con respecto a los efectos de la llegada de Colón a América, al mencionar “la masacre de tantos pueblos rojos, en verdad viciosos y crueles, pero sensibles al sufrimiento”. Parece un caso interesante de arrastre de prejuicios desde épocas remotas hasta el umbral del siglo XX. Hay aquí una línea de pensamiento que va desde Ginés de Sepúlveda, Corneille de Pauw y Chateaubriand, hasta llegar a Anatole France. El problema de los prejuicios es que mientras más nos acercamos a nuestra propia época, con menor facilidad los encontramos, y ello aunque sigan ahí, en una sola línea de un cuento casi olvidado.

jueves, 3 de junio de 2010

El chocolate latinizado

En mis búsquedas desesperadas por algo de lo cual escribir, encontré en un manuscrito de la Biblioteca Nacional de México algo interesante. Era uno de esos libritos que se llamaban rapiaria (o rapiarium, en singular) y que se usaron durante más de dos siglos en la enseñanza que impartieron los jesuitas en la época colonial. Son más o menos el equivalente a un cuaderno de notas de un estudiante de la actualidad, pero estos libritos los llenaban poco a poco los estudiantes siguiendo un patrón y un orden muy definido: como eran principalmente para aprender latín, asignaban a cada hoja una letra del alfabeto y poco a poco iban poniendo las palabras raras o locuciones que aprendían. Eran algo así como un diccionario personal, que al mismo tiempo tenía extractos o pasajes de diversos autores que los estudiantes consideraban representativos, o a veces composiciones de los mismos estudiantes.

Pues en uno de esos libritos, el manuscrito 1418 de la Biblioteca Nacional (seguramente del siglo XVIII) un estudiante llamado Fermín chocolateimageGoycochea transcribió dos textos en latín acerca del chocolate. Primero pensé que eran composiciones de un criollo novohispano en  latín, pero después de muchas horas de búsqueda y desesperación, me di cuenta de que eran extractos de otras obras: uno, de la obra llamada Columbus, largo poema épico en latín que tenía como héroe principal a Cristóbal Colón, publicada en 1716 y escrita por Ubertino Carrara; otro, de la obra Aestates Surrentinae (Los veranos de Surrento) de Niccolò Partenio Giannettasio, que apareció en 1697 y es un texto principalmente descriptivo en latín acerca de esa ciudad. Las dos, sobra decirlo, son obras que hoy en día devoran sólo los especialistas.

Aquí están, pues, los dos textos, tanto en latín como en la traducción:

 

Cocolactis apparatus ex Carrara

Ubertino Carrara (Colombus: 10, v.705)

Ms. 1418 de la B.N., Fol. 92. v

 

"Dignum Divorum mensis apponite nectar,"

Iusserat: incubuere operi non segniter omnes.

Concava pars effert argenti vascula puri,

Deque una gelida vicini fluminis hausta

Mensuram super iniiciunt; pars arida ligna

Lampade supposita succendit, et excitat ignem.

Clausus vase latex, simul ac sentire calorem

Coepit, et ad bullas praemittere murmura primas ;

Tunc aliae cocolactis redolentia dona

Desuper infundunt: virgae mox tortilis orbe

Usque adeo versant arguta liquamina, donec

Delicias spumae faciant, acuantque palatum.

Potus ut ad votum succesierat; arte magistra

Urceolo ingeritur nucis Indae, cuius obibat

Circulus extremas argenti fusilis oras;

Inde propinandus juveni datur: accipit ille

Spumantem pateram, quam vix admoverat ori,

Delinitus odoriferi dulcedine roris.

Non cito degluttit, sed sorbillare perita

Quod sapit, in longum gustus patientia differt,

Gaudeat utque magis, piger est ad gaudia sensus.

 

Preparación del chocolate, extraído de Carrara

Ubertino Carrara

Traducción de Joaquín Rodríguez B.

“Sirvan en las mesas el néctar digno de los dioses”, había ordenado, y se arrojaron todos con premura al trabajo. Unos sacan vasos cóncavos de plata pura y les vierten una porción de agua helada recogida de un río cercano, otros encienden leña seca poniendo una antorcha por debajo y atizan el fuego. Apenas el líquido encerrado en el vaso comienza a sentir el calor y a emitir ruidos en las primeras burbujas, se esparcen hacia arriba los olorosos dones de otro chocolate. En seguida, haciendo círculos con una vara retorcida, revuelven continuamente la fina mezcla hasta crear las delicias de la espuma y así estimular el paladar. El líquido se había ido a la superficie como para un regalo, y siguiendo la técnica como maestra, se introduce en un cuenco de coco, cuyo círculo rodeaba los bordes extremos de la plata moldeada [1]. Después, se le da a probar a un joven. Recibe él la espumeante taza, y apenas se la ha acercado a la boca, se impregna del dulzor del jugo perfumado. No lo engulle rápidamente, sino que la paciencia, experta en sorber poco a poco lo que tiene sabor, deja para después las degustaciones. Con tal de deleitarse más, el gusto es lento con los deleites.

 

Americanae potionis confectio ex Parten in Surrent.

Niccolò Partenio Giannettasio (Aestates Surrentinae, pp. 83-85, Liber I, Caput VIII).

Ms. 1418 de la B.N., Fol. 93. v. y Fol. 94 r.

 

Hoc loco Lucilius, cum aures turriculae applicuisset, "Bullit," inquit, "ni fallor, aqua." Tum ego educo ex arcula mundum cocolathicum. Et primum papyrum solida caeruleam explico in mensula; inque illa nuceam tabellam levigatam impono, deinde cylindrulum selibrem Americani nectaris vetustissimum sinistra accipio. Dextra vero bipennulam semilunarem; tabellaque super sextantem fere cylindruli minutim reseco. Mox duellam sacchari cochleare accipio, admisceoque cocolathe, cui dulcarium orbiculum odoratum ex illis, quos mihi Consentia Galvaeus dono miserat, adiungo. Tandem cuncta promisce, educto operculo, in ollam proiicio, atque operio iterum.

Deinceps in mensula sericum linteum explico, inque eo conicum vasculum, candidum, perlucidum, mirisque sigillis serico opere depictum, atque disctintum colloco. Volebam gratissimum mihi sui merito iuvenem, hoc splendido apparatu, honoris gratia excipere, atque exhilarare. Enim serica item in patella sigillis illiuscemodi interpicta, atque oculis stellantibus mirum in modum interstincta aliquot Lusitanica bellaria impono: fiunt haec ex polline siligineo perquam niveo, ovo, atque Indico sale; quae in unum coacta tandiu pilo diverberantur, quoad in spumam assurgant; furno mox coquuntur. Illis a vernaculo nomine barbae superioris labri vulgus nostratim cognomen fecit. Mos est Hispanis, qui ad nos iam transiit, ut prius quam cocolathem hauriant, isthaec nectare madefacta praelibent.

Sed iam licuatus cocolathes versicolorem in spumam alte assurrexerat: quo circa e foculo ollulam educo, expansaque super papyro, ne mensulam commurcarem, impono. Interea iubeo Lucilium ellychnia extinguere, myxis forfice dissectis. Ipse vero ex arcula trusatile molile accipio, molamque intrudo in ollulam, axemque versans utraque palma cocolathem molio: et tamdiu diverbero, quoad humor fere totus in spumam abivit. Tum denique, vase inclinato, paulatim mola spumam educo, versoque in vasculum: simul ac infuderam cocolathem continuo diverbero, versoque iterum: id cum tertio fecissem, totumque spumeo nectare vasculum adimplessem, Lucilio subministro.

Accepit ille perquam modeste. Vix primoribus labris digustavit, cum “Probatissimum” inquit “est, cum suavitate liquoris, tum aromatum suaviolentia; confectum item scitissime”. Cum vero rursus sorbillasset, “quam suave!” inquit. Ut olim de re delicatissima dicebatur mellis medulla, nunc videtur dicendum Indicum nectar.

 

Preparación de la bebida americana, extraído de Partenio en Aestates Surrentinae

Nicolás Partenio

Traducción de Joaquín Rodríguez B.

En ese momento, Lucilio, después de prestar oídos a la torrecilla, dice: “Si no me equivoco, el agua está hirviendo”. Entonces yo saco de la cajita los utensilios para el chocolate. Y primero extiendo un papel oscuro en la sólida mesa y en él pongo una tablilla pulida de nogal. Después tomo con la mano izquierda el antiquísimo [2] rollo de media libra del néctar americano; y con la derecha, un [cuchillo] de doble filo en forma de media luna. Y sobre la tablilla corto en trocitos casi la sexta parte del rollo. En seguida, tomo un tercio de onza de azúcar calcáreo y lo mezclo con el chocolate, al cual le añado una ruedecita endulzada y perfumada con las cosas que, convenientes para mí, Galves había enviado como regalo. Cuando todo está ya bien mezclado, le quito la tapa a una olla, le echo todo y la tapo otra vez.

Después, extiendo sobre la mesa una tela de seda, y en ésta coloco un vaso cónico de color claro, brillante, ilustrado y adornado de figuras maravillosas al estilo oriental [3]. Quería recibir con esta espléndida preparación y mediante la gracia del honor a este joven, tan querido para mí por su propio mérito, y que se regocijara [4]. De modo que también pongo en un plato oriental, adornado con el mismo tipo de figuras y pintado de colores de un modo tan admirable que ponía los ojos vidriosos, algunas golosinas lusitanas esparcidas. Se hacen éstas de una fina y blanquísima harina de trigo, huevo y azúcar; lo cual, mezclado en una sola masa, se machaca en un mortero hasta que se convierta en espuma y en seguida se cuece en horno. A tales golosinas, a partir de una palabra popular el vulgo les ha dado el sobrenombre, según nuestra costumbre, de bigotes. Lo que acostumbran los españoles, lo cual ya ha llegado a nosotros, es, antes de ingerir el chocolate, probarlas remojadas en la bebida.

Pero el chocolate, ya derretido, había subido a lo alto en una espuma de otro color, por lo cual saco la olla del fuego y la pongo sobre el papel extendido para no dañar la mesa. Mientras tanto, le ordeno a Lucilio apagar las mechas del candil cortando con unas tijeras los pabilos. Y yo mismo tomo de la cajita un molinillo manual e introduzco la muela en la olla; dándole vueltas a su eje con cada mano, ablando el chocolate. Y bato hasta que casi todo el líquido se haya convertido en espuma. Y entonces, finalmente, con el vaso inclinado quito con la muela poco a poco la espuma, y se la echo al vaso. Tan pronto como he derramado el chocolate, la separo en seguida y se la echo de nuevo. Habiéndolo hecho por tercera vez y habiendo llenado todo el vaso con la bebida espumeante, se lo proporciono a Lucilio.

Lo recibe él con gran moderación y en cuanto lo prueba con el borde de los labios, dice: “Está delicioso, no sólo con dulzura de líquido, sino también con una dulce fragancia de aromas; hecho también muy sabiamente”. Y al sorber otra vez, exclama: “¡Qué dulce!”. Así como antes se decía “corazón de miel” respecto a algo muy delicado, así parece ahora que debe decirse “néctar de las Indias”.

 


[1] Se trata de las famosas mancerinas, cuya invención se le suele atribuir al virrey de Perú Marqués de Mancera.

[2] Es difícil interpretar la palabra antiquísimo, vetustisimus en latín. Hay al menos en dos sentidos que se le pueden dar: por un lado, en un sentido literal, haciendo referencia a un rollo que efectivamente estaba viejo; se decía que el chocolate sólido podía durar sin pudrirse hasta 20 años, ventaja que facilitó sin lugar a dudas el comercio. Por otro lado, tal vez tenga un significado más general, pues la tradición de elaborar chocolate sólido para su uso posterior en la preparación de la bebida se podía remontar hasta la época prehispánica.

[3] Literalmente, según el trabajo de los seres, aquel pueblo del Asia central y de la China occidental al que se atribuye el origen de la seda.

[4] Aunque por la forma del texto latino, sería el sujeto el que se regocija, parece más bien referirse al joven.

domingo, 21 de marzo de 2010

Una égloga novohispana en latín del siglo XVII

Tal vez el acto mismo de escritura entrañe siempre una especie de lucha con lo ya existente, un esfuerzo por tomar el propio lugar frente a la enorme masa de la tradición formada a partir de lo que ya se ha escrito. A veces, el tema mismo que se aborda en una obra literaria es esta lucha, como si el motor de la escritura fuera cierta necesidad de asumir una posición determinada ante la tradición, ya sea para reutilizarla y transformarla, ya sea para enfrentarla y negarla. De un modo general, la literatura novohispana tiene esto como nota distintiva. Parece siempre empeñada en construirse una plataforma que tenga sentido en el marco de la tradición europea; entiéndase, la del occidente de Europa, que para el siglo XVII ya había prácticamente terminado con aquel largo proceso de apropiación de la tradición grecolatina que comúnmente llamamos Renacimiento.

He aquí, pues, un ejemplo de ello. Es un texto que aparece manuscrito en un ejemplar relativamente famoso del fondo reservado de la Biblioteca Nacional de México: el manuscrito 1631. El texto se sitúa justo después de otro que lleva por subtítulo “Vaticinium de progressu in litteris Mexicanae iuventutis”, es decir, “Vaticinio acerca del progreso de la juventud mexicana en las letras”. El que transcribo y traduzco aquí se llama “Eccloga de eadem re”, “Égloga del mismo asunto”, de modo que hay que atribuirle el mismo subtítulo.

Eccloga de eadem re [Vaticinium de progressu in litteris Mexicanae iuventutis]. Dorilas et Lycon.

Luis Peña

Lycon : Dum vacuae fluitant paccato in litore nassae

et mare caeruleum placidis involvitur undis,

desine composita lateat sub arundine cuspis,

O Dorila, ac mecum scopuli pendentis in umbra

et viridi requiesce toro, sedem alga ministrat

invitatque leves intexere vimine cistas.

Hinc ego tuque illinc ambo vicina trahemus

captivos, siqui fuerint, ad littora pisces.


Dorilas: Consideo et priscos dum mente remetior annos

mirabar mea saecla, Lycon, quantum aequore toto

auspicio divum nostri valuere nepotes

quantaque promissae nobis stent pignora frugis.


Lycon: Atque ego dum tenuem subduco in litore pupim

exspectans celeres ad dulcia pabula thynnos

nostrorum heroum tantos mirabar honores,

quippe sacer coluit nuper sua litora Apollo

instituitque novas venandi in gurgite formas,

quas nunquam nostris ullus piscator in oris

vidit nec prisci potuere agnosci nautae.


Dorilas: Adde quod edocuit nostri novus incola ponti:

quomodo temporibus venientia tempora lapsis

succedant, qua lege vagos agitare cachinnos

expediat, remisque udos percurrere campos

ac tandem iratos pelagi componere fluctus.


Lycon: Ortygiam Phebus Tenedon dilexit Apollo,

grata Iovi Creta est, Baccho gratissima Nissus.

Sed mea vidissent si litora, protinus ipse

Ortygiam Phebus Tenedon liquisset Apollo.


Dorilas: Pallada Cecropidae, coluit Minoia Dianam,

celsa Paphus Venerem, Iunonem maxima Memphis.

Sola est Hesperia, Hesperiae si commoda norint

nec Paphus occiduas nec Memphis vinceret oras.

Égloga del mismo asunto [El progreso de la juventud mexicana en las letras]. Dórilas y Licón.

Luis Peña

Traducción de: Joaquín Rodríguez B.

Licón: Mientras las cestas flotan vacías en la costa apacible y el mar oscuro se agita con las plácidas olas, deja que el anzuelo se oculte bajo la caña dispuesta, oh Dórilas, y descansa conmigo a la sombra del peñasco saliente en este verde lecho. El alga nos proporciona asiento y nos invita a tejer ligeras canastas de mimbre. Yo aquí y tú allí, ambos arrastraremos peces cautivos a la costa vecina, si es que los hay.

Dórilas: Aquí sentado y al repasar en la mente los años pasados, admiraba nuestros tiempos, Licón, de cuánto han sido capaces nuestros nietos en todo el mundo por auspicio de los dioses, y cuántas garantías del fruto prometido hay para nosotros.

Licón: Y yo, al llevar una ligera barca a la orilla, esperando que los veloces atunes se dirijan hacia el dulce alimento, admiraba qué grandes honores los de nuestros héroes, pues no hace mucho que el sagrado Apolo habitó sus costas y les enseñó nuevas formas de pescar en el mar, las cuales ningún pescador en nuestras tierras vio nunca, ni los marineros experimentados pudieron reconocer.

Dórilas: Y añade a eso lo que enseñó el nuevo habitante de nuestro mar: de qué modo los tiempos venideros suceden a los tiempos pasados, con qué precepto conviene censurar las risas caprichosas, y recorrer los húmedos campos con los remos y finalmente apaciguar las corrientes irritadas del mar.

Licón: Febo Apolo les tuvo aprecio a la islas Ortiga y Ténedos, Creta es grata a Zeus y Niso muy grata a Baco. Pero si hubieran visto mis costas, al instante el mismo Febo Apolo habría abandonado Ortigia y Ténedos.

Dórilas: Los atenienses honraron a Palas, Creta a Diana, la alta Pafos a Venus, la gran Menfis a Juno; pero la Hesperia está sola. Si conocieran las ventajas de la Hesperia, ni Pafos ni Menfis superarían a las tierras occidentales.

______________________________________________

Recuérdese, al respecto, que la Hesperia era el nombre que se usaba para designar las tierras occidentales. Las Hespérides habitaban en un jardín poblado de árboles con manzanas de oro, el cual vigilaban con ayuda de un dragón. Es una especie de paraíso en la mitología griega, y en este caso Luis Peña lo identifica con América.

Así, parece que lo que se enfatiza al decir que Apolo (es decir, el arte de la poesía) acaba de llegar a las tierras occidentales y que “nuestros héroes” ya tienen muchos honores, es el hecho de que la juventud mexicana haya logrado avances en tan poco tiempo, como si el germen de las letras hubiera llegado a un lugar sumamente fértil: la Hesperia. Se percibe, por tanto, esa mezcla de sentimientos tan típica de las expresiones patrióticas del siglo XVII y XVIII: por una parte, sentirse como recién nacido (los modos de pescar o hacer poesía que Apolo enseñó en América jamás habían sido vistos por ningún pescador o poeta americano); por otra parte, sentirse orgulloso de lo propio.